Sources:
Christine de Suède et la cardinal Azzolino. Lettres inédites (1666-1668), Carl Bildt, 1899
Kristina wrote this letter to Cardinal Decio Azzolino on March 14, 1668.
The letter:
14 Mars 1668 —
Je vois de la Vostre du 18 du passe que mes lestres on eu le mesme destin que le Vostres et Vous avez este deux ordinaire san les recevoir ausi bien que moy. Je suis bien aise du moins que ce petit Chagrin Vous soit arrive dans le Carneval esperent que les faistes et les divertissements Vous lauront fait oublier san paine. ie vous rens grace de la paine que Vous prennez de men faire part sur la mort du frarnese Card.l frarnese Je tiens que Vous et moy povvons dire davoir fait une grande perte et ie Crois que nostre fortune y aura Contribue beaucoup.
Je suis este moẏ mesme sur le Confin de laustre monde en poste et men suis retourne de mesme. Mercredi nuit apres avoir receu a vne heure Vos lestres ie me Chougay quelque Moments apres les avoir leus et me portois encore bien, mais la nuit la fievre me prit dont ie ne fis pas de cas. le lendemain Ver le midi ie fus attaque dune espece de schiranzie que ie supportois touts le iour san me rendre mestant resolu de me faire saigner le lendemain matin mais Ver le soir elle aumenta de telle sorte quelle me mist en peu des moment en estat de ne pouvoir ny respirer ny avaler ny Casi parler Cela me fist resoudre a me faire trier du sang sen lheure mesme, et cela fust fait et ie men fis trier san discretion ce qui me Causa une espece de defalliance qui fallist a me faire perdre la vie, quoy que mes sentiments ne mabbandonnerent iamais et que ieucse tousiour assez de iugement pour ordonner tout ce quil faloit faire pour mon secour. mais cette sainge me sauva la vie Car ie tiens pour infallible que si ieus attendu le matin il estoit fait de moẏ et Jl eust este impossible de me sauver. enfin avec une saignee et quelque lavements ie suis sortie d'affaire et quoy que ma foiblesse fust extreme ie nay iamais garde entierement le lit et la fievre qui ne me quitta que dimange dernier empota a linstan toutte ma foiblesse avec elle. et a present ie me porte ausi bien que iamais, et Vous puis asseurer que ma bile ne ma gere ioue iamais de plus meschant tour.
On ne doutte plus icy de la gerre universelle, lollande et l'Angleterre la declareront Coniointement a la france la Suede est Compris dans cette ligue de la maniere que ie Vous ay dit dans mes presedentes, et toutte la terre prendra celluy le party de lespange Cest de quoy Jl ne faut plus doutter si Rome ne donne la paix a la Christiente, nous sommes a la veillie dune gerre qui ne finira de lontemps et qui apportera bien du Changement dan lEurope.
Vrangel qui est parti dsy dicy vendredi passe sera bientost de retour pour passer par icy en pomeranie la paix de portugal est enfin Veritablemant Conclue et lon atten D. Jean daustriche en flandre avec le secours qui doit apporter qui Celon toutte les apparences doit estre Celluy de pise. dieu vous Conserve et prospere tousiour adieu
With modernised spelling:
Hambourg, 14 mars 1668.
Je vois de la vôtre du 18 du passé que mes lettres ont eu le même destin que les vôtres, et vous avez été deux ordinaires sans les recevoir aussi bien que moi. Je suis bien aise du moins que ce petit chagrin vous soit arrivé dans la carnaval, espérant que les fêtes et les divertissements vous l'auront fait oublier sans peine. Je vous rends grâce de la peine que vous prenez de m'en faire part. Sur la mort du cardinal Farnèse, je tiens que vous et moi pouvons dire d'avoir fait une grande perte, et je crois que notre fortune y aura contribué beaucoup.
Je suis été moi-même sur le confin de l'autre monde en poste et m'en suis retournée de même. Mercredi nuit, après avoir reçu à une heure vos lettres, je me couchai quelques moments après les avoir lues et me portais encore bien, mais la nuit la fièvre me prit, dont je ne fis pas de cas. Le lendemain, vers le midi, je fus attaquée d'une espèce de schiransie, que je supportai tout le jour sans me rendre, m'étant résolue de me faire saigner le lendemain matin; mais, vers le soir, elle augmenta de telle sorte qu'elle me mît, en peu de moments, en état de ne pouvoir ni respirer, ni avaler, ni quasi parler. Cela me fit résoudre à me faire tirer du sang en l'heure même; cela fut fait et je m'en fis tirer sans discrétion, ce qui me causa une espèce de défaillance qui faillit à me faire perdre la vie, quoique mes sentiments ne m'abandonnèrent jamais, et que j'eusse toujours assez de jugement pour ordonner tout ce qu'il fallait faire pour mon secours. Mais cette saignée me sauva la vie, car je tiens pour infaillible que si j'eusse attendu le matin, il [en] était fait de moi et il eût été impossible de me sauver. Enfin, avec une saignée et quelques lavements, je suis sortie d'affaire. Quoique ma faiblesse fût extrême, je n'ai jamais gardé entièrement le lit, et la fièvre, qui ne me quitta que dimanche dernier, emporta à l'instant toute ma faiblesse avec elle. Et à présent, je me porte aussi bien que jamais, et vous puis assurer que ma bile ne m'a guère joué de plus méchant tour.
On ne doute plus ici de la guerre universelle: la Hollande et l'Angleterre la déclareront conjointement à la France. La Suède est comprise dans cette ligue de la manière que je vous ai dit dans mes précédentes, et toute la terre prendra le parti de l'Espagne, c'est de quoi il ne faut plus douter. Si Rome ne donne la paix à la Chrétienté, nous sommes à la veille d'une guerre qui ne finira de longtemps et qui apportera bien du changement en Europe.
Wrangel, qui est parti d'ici vendredi passé, sera bientôt de retour pour passer par ici en Poméranie. La paix de Portugal est enfin véritablement conclue, et l'on attend D. Jean d'Autriche en Flandre, avec le secours qu'il doit apporter, qui, selon toutes les apparences, doit être celui de Pise. — Dieu vous conserve et prospère toujours. — Adieu.
English translation (my own):
March 14, 1668. —
I see from your letters of the 18th of last month that my letters had the same fate as yours, and you went two ordinaries without receiving them as well as I did. I am glad at least that this little sorrow happened to you during Carnaval, hoping that the parties and the entertainment will have made you forget it easily. I thank you for the trouble you take in telling me about it. On the death of Cardinal Farnese, I hold that you and I can say that we have suffered a great loss, and I believe that our fortune will have contributed a great deal to it.
I myself have been on the confines of the other world in post and have returned in the same way. Wednesday night, after having received your letters at one o'clock, I went to bed a few moments after having read them and was still doing well, but at night the fever took hold of me, which I did not care about. The next day, around noon, I was attacked with a sort of scheranzia, which I endured all day without surrendering, having resolved to let myself be bled the next morning; but, towards evening, it increased in such a way that it put me, for a few moments, in a condition not to be able to breathe, nor to swallow, nor almost to speak. This made me resolve to have blood drawn at the same hour; this was done and I did it without discretion, which caused me a kind of failure which nearly made me lose my life, although my feelings never abandoned me, and I always had enough judgment to order whatever needed to be done for my rescue. But this bleeding saved my life, for I hold it infallible that if I had waited for the morning, it would have been all over with me and it would have been impossible to save me. Finally, with a bloodletting and a few enemas, I was out of the woods. Although my weakness was extreme, I never stayed in bed all the time, and the fever, which did not leave me until last Sunday, instantly carried all my weakness with it. And now I am doing as well as ever, and I can assure you that my gall has hardly played a nastier trick on me.
There is no longer any doubt here of the universal war: Holland and England will jointly declare it against France. Sweden is included in this league in the way I told you in my previous letters, and the whole world will side with Spain, that is what we must no longer doubt. If Rome does not give peace to Christendom, we are on the eve of a war which will not end for a long time and which will bring a lot of change in Europe.
Wrangel, who left here last Friday, will be back soon to pass through here in Pomerania. The peace of Portugal is finally truly concluded, and Duke Johannes of Austria is expected in Flanders, with the help he must bring, which, according to all appearances, must be that of Pisa. — God keep you and prosper always. — Goodbye.
Above: Kristina.
Above: Cardinal Decio Azzolino.
Notes: scheranzia = esquinancy, angina.
to be of Pisa (essere di Pisa) = a phrase used in Italian to designate help that arrives too late. It alludes to the help promised by Emperor Maximilian to the city of Pisa besieged by the Florentines in 1509. The Emperor's troops were repeatedly pushed back by the Venetians and could not cross the Alps in time, so that Pisa had to to surrender.
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