Sources:
Christine de Suède et la cardinal Azzolino. Lettres inédites (1666-1668), Carl Bildt, 1899
Kristina wrote this letter to Cardinal Decio Azzolino on June 27, 1668.
The letter:
27 Juin 1668
Vostre lettre du 2 du present ma fait rire sur ce que Vous dittes si spirituellement et galament sur ma maniere de Voiager. a Vous dire le Vray ie pense que Vous avez raison, mais ie nay pas tort ausi. Vous macusez de Voiager comme vn esprit et que Cette maniere teue tout Ceux qui ont du Corps, mais iay a vous demander si Vous aime mieux me faire mourir ou de faire mourir les austres, Car il est Certain que de Voiager a ma mode le fera Crever, et que si ie Voiage a la leure ien moureray ausi. mais le passe nest rien et ie me prepare a un austre Voiage qui sera bien austre Chose que tout Ceux que vous avez veus, Car il faut le faire de cette maniere ou ne sen mesler pas. Je me porte bien presentement. dinero y salud para gastarlos. mentende Vous.
les estats Continue a sassembler en Suede la Regence fait de mesme, iattens tous les iour la novlle de la proposition et de louverture de la diette. ie Vous en feray bientost un Veritable pronostique de son succes et de la fin et ie preten de ne my tromper gere et ie prediray sa fin san y manque peut estre de huit ou de dix iours. lhomme que iẏ ay envoẏe y arrivera si a temps que lon ne peut souhaitter rien de plus. quant la diette sera finie Je Vous declareray Categoriquement mes intentions. nous Verrons Cepandant Ce qui arrivera. Jespere avec beauCoup dapparance quon me donnera lexcercice de la religion libre en Suede si les efforts et les artifices que fera la Regence pour lempecher ne lemporte sur laffection et sur le desir vniversel de Estats qui me lon accorde il y a longtemps, mais il faut Voir Cepandant iespre auec beaucoup de fondement.
Je suis ravẏe de Voir lapplication de Sa S.te pour le secour de la Candie. Cette application ne peut estre plus glorieuse ny plus necessaire, mais iay Vous diray que de la maniere quon si prendt on ne fera rien, la Candie ne peut estre secourue que par vne forte diversion et puisque Vous dittes quil ny a pas de quoy la faire ie la Crois perdue. ie Vous demande pardon de la liberte que ie prens de faire loẏseau de mauvais augure.
nous avons attendu le Conestable icy depuis quelque iours lorsque les lestres de pomeranie nous on porte la nouvelle quil a este attaque de sa gravelle tres rudement lorsquil estoit sur le point de partir. Cest domage qve ce grandt homme se trouve dans vn estat si miserable Car il est accable de lage des maladies des chgrains et plus que de tout Cela de la paix qui le mest au desespoir. Jl ny a au reste austre nouvaute icy que Celluy dun desarmement genneral partout.
Je suis fache que la Commedie est sur la fin Car toutte ma Consolation est finit avec elle. Cest domage quune si belle Chose demeure imparfaitte, mais iespere que Vous pourez derobber quelque moment du temps pour lachever, si non ien seray inConsolable. Jattens avec impacience les lestres de Vous se soir Car mon vnnique Consolation est de Vous escrire et de recevoir de Vos Nouvelles. Je prie dieu de les recevoir tousiour teles que ie les desire de Vostre prosperite et sante adieu
Je voy ie ne say quoy qui me persuade auec estonnement que Vostre fortune donne de lenvie et de la Jalousie a Vos meillieurs amis. Cela me scandalise au dernier point mais ie men Console en minmaginant quil nẏ ie suis seulle a que moy au monde Capable de regarder Vostre fortune avec la ioye et la tendresse que ie merite seulle de resentir pour Vostre prosperite —
With modernised spelling:
Hambourg, 27 juin 1668.
Votre lettre du 2 du présent m'a fait rire sur ce que vous dites si spirituellement et galamment sur ma manière de voyager. A vous dire le vrai, je pense que vous avez raison, mais je n'ai pas tort aussi. Vous m'accusez de voyager comme un esprit, et que cette manière tue tous ceux qui ont du corps; mais j'ai à vous demander si vous aimez mieux me faire mourir, ou de faire mourir les autres, car il est certain que de voyager à ma mode les fera crever, et que si je voyage à la leur, j'en mourrai aussi. Mais le passé n'est rien, et je me prépare à un autre voyage qui sera bien autre chose que tous ceux que vous avez vus, car il faut le faire de cette manière ou ne s'en mêler pas. Je me porte bien présentement. Dinero y salud para gastarlos. M'entendez-vous?
Les États continuent à s'assembler en Suède, la régence fait de même; j'attends tous les jours la nouvelle de la proposition et de l'ouverture de la Diète. Je vous en ferai bientôt un véritable pronostic de son succès et de la fin, et je prétends de ne m'y tromper guère, et je prédirai sa fin sans y manquer peut-être de huit ou de dix jours. L'homme que j'y ai envoyé y arrivera si à temps que l'on ne peut souhaiter rien de plus. Quand la Diète sera finie je vous déclarerai catégoriquement mes intentions. Nous verrons cependant ce qui arrivera. J'espère avec beaucoup d'apparence qu'on me donnera l'exercice de la religion libre en Suède, si les efforts et les artifices que fera la régence pour l'empêcher ne l'emportent sur l'affection et sur le désir universels des États qui me l'ont accordé il y a longtemps; mais il faut voir. Cependant j'espère avec beaucoup de fondement.
Je suis ravie de voir l'application de Sa Sainteté pour le secours de la Candie. Cette application ne peut être plus glorieuse ni plus nécessaire; mais je vous dirai que, de la manière qu'on s'y prend, on ne fera rien; la Candie ne peut être secourue que par une forte diversion, et puisque vous dites qu'il n'y a pas de quoi la faire, je la crois perdue. Je vous demande pardon de la liberté que je prends de faire l'oiseau de mauvais augure.
Nous avons attendu le connêtable ici depuis quelques jours, lorsque les lettres de Poméranie nous ont porté la nouvelle qu'il a été attaqué de sa gravelle très rudement, lorsqu'il était sur le point de partir. C'est dommage que ce grand homme se trouve dans un état si misérable, car il est accablé de l'âge, des maladies, des chagrins, et, plus que de tout cela, de la paix qui le met au désespoir. Il n'y a, au reste, autre nouveauté ici que celle d'un désarmement général partout.
Je suis fâchée que la comédie est sur la fin, car toute ma consolation finit avec elle. C'est dommage qu'une si belle chose demeure imparfaite; mais j'espère que vous pourrez dérober quelque moment du temps pour l'achever, sinon j'en serai inconsolable. J'attends avec impatience les lettres de vous ce soir, car mon unique consolation est de vous écrire et de recevoir de vos nouvelles. Je prie Dieu de les recevoir toujours telles que je les désire de votre prospérité et santé. — Adieu.
Je vois je ne sais quoi qui me persuade avec étonnement que votre fortune donne de l'envie et de la jalousie à vos meilleurs amis. Cela me scandalise au dernier point, mais je m'en console en m'imaginant qu'il n'y a que moi au monde capable de regarder votre fortune avec la joie et la tendresse que je mérite seule de ressentir pour votre prospérité.
English translation (my own):
June 27, 1668.
Your letter of the 2nd of this month made me laugh at what you say so spiritually and gallantly about my way of traveling. To tell you the truth, I think you are right, but I am not wrong too. You accuse me of traveling like a spirit, and that this way kills all those who have a body; but I have to ask you if you prefer to kill me, or to kill others, because it is certain that traveling in my fashion will make them die, and that if I travel in theirs, I will die too. But the past is nothing, and I am preparing for another journey which will be quite different from any that you have seen, because you have to do it that way or not interfere. I am doing well now. Dinero y salud para gastarlos. Do you hear me?
The Estates continue to assemble in Sweden, the regency does the same; I await the news of the proposal and the opening of the Riksdag every day. I will soon give you a real prognosis of its success and of the end, and I pretend I am not mistaken, and I will predict its end without missing perhaps eight or ten days. The man I sent there will get there so in time that nothing more can be wished for. When the Diet is over, I will categorically declare my intentions to you. We will see what will happen, however. I very much hope that I will be given the exercise of free religion in Sweden, if the efforts and artifices which the regency will make to prevent it outweigh the universal affection and desire of the Estates which granted it to me a long time ago; but you have to see. In the meantime, I hope with great foundation.
I am delighted to see the application of His Holiness for the relief of Candia. This application could not be more glorious nor more necessary; but I will tell you that, the way one goes about it, one will do nothing; Candia can only be rescued by a strong diversion, and since you say there is nothing to do with her, I believe she is lost. I beg your pardon for the liberty I take to make the bird of ill omen.
We have been waiting for the Constable here for a few days, when the letters from Pomerania brought us the news that he was attacked by his urinary calculus very roughly, when he was about to leave. It is a pity that this great man is in such a miserable state, for he is overwhelmed with age, illnesses, sorrows, and, more than all of this, the peace that puts him to despair. There is, moreover, no other novelty here than that of general disarmament everywhere.
I'm sorry the comedy is over, because all my consolation ends with it. It is a pity that such a beautiful thing remains imperfect; but I hope you can steal a moment of your time to finish it, otherwise I will be inconsolable. I look forward to receiving letters from you this evening, for my only consolation is to write to you and hear from you. I pray to God to always receive them as I desire them from your prosperity and health. — Goodbye.
I see I do not know how to convince myself with astonishment that your fortune gives envy and jealousy to your best friends. This scandalises me to the greatest point, but I console myself by imagining that I am the only one in the world capable of looking at your fortune with the joy and tenderness that I alone deserve to feel for your prosperity.
Above: Kristina.
Above: Cardinal Decio Azzolino.
Notes: "Dinero y salud para gastarlos." = "Argent et santé sont faits pour être dépensés." ("Money and health are meant to be spent.")
Candia = the island of Crete.
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