Friday, August 20, 2021

Anne-Geneviève of Bourbon-Condé, Madame de Longueville's letter to Pierre Bourdelot on Kristina's intention to abdicate, dated April 5/15 (New Style), 1654

Sources:

Documents originaux et copies, mémoires et extraits tirés de la Bibliothèque du Roi, 1653-1654, view 19; Gallica, Bibliothèque nationale de France


Mémoires concernant Christine, volume 1, page 449, Johan Arckenholtz, 1751




The letter (copy, last page missing):

Lettre de Madame la Duchesse de Longueville a Mr Bourdelot
Vous m'auez donné le plus grande plaisir du monde de mauoir faict part de laction heroique de vostre grande Reine en Verité elle est incomparable & lon peut dire qu'en quittant Vne couronne elle se rend digne de porter toutes celles de la terre, & qu'en cessant de Vouloir commander a ses subiects elle merite de commander a tout le monde. Rien n'est plus ayse que de labandonner quand Jl nous a exposé a Vne longue Suitte dJnfortunes, il nest pas difficile de les mespriser quand il s'est monstre a nous de son mauuais costé, & que par nostre experience nous auons treuué quil n'est remply que dJnfidelité de foiblesse & de trahison. Je sens fort bien qu'en cet estat on peut chercher la Solitude plustost par amour propre, que par vn destachement malayse à conceuoir & a prattiquer, mais au contraire, c'est Vne Vertu bien esleuée que celle qui oblige de discendre Volontairement dvn Throne affermy, que celle qui faict hair le monde quand il ne nous faict Voir que ce quil a d'agreable, qui nous le faict fuir quand il nous cherche & enfin qui nous faict prendre & executer Vne resolution comme celle que la Reine de Suede Vient de Suiure au milieu du triomphe & de la prosperité. Jl nappartenoit qu'a elle de se despouiller de la Souueraine authorité, quand Tout ce qui despendoit de la Sienne luy estoit aussy soubmis par inclination que par devoir, & on ne peut rien Souhaiter a cette grande action Si ce n'est que son motif ne soit pas purement moral & que Dieu Soit sa principalle Fin. Si la conversion de cette Princesse couronne cette conduitte admirable on pourra dire auec Verité, que Jamais aucune creature n'aura esté reuestue dvne plus esclattante gloire, Car enfin Jl ne faut pas Se Contenter de celle que nous pouuons acquerir en ce monde, ce quil donne & mesme ce quil promet nest pas capable de Satisfaire Tousiours Vn esprit esclairé ...

Bardin's transcript of the letter:

Vovs m'auez fort obligé de m'auoir fait part de l'action héroique de vostre grande Reyne; en verité elle est incomparable, & on peut dire qu'en quittant vne Couronne, elle se rend digne de porter toutes celles de la terre; & qu'en cessant de vouloir commander à ses suiets, elle merite de commander à tout le monde. Rien n'est plus aysé que de l'abandonner quand il nous a exposé à vne longue suitte d'infortunes; il n'est pas difficile de le mépriser, quand il s'est montré à nous de son mauuais costé, & que par nostre experience nous auons trouué qu'il n'est remply que d'infidelitez de foiblesse & de trahison. Ie sens fort bien qu'en cét estat on peut chercher la solitude plûtost par amour propre, que par vn détachement, mal-aisé à conceuoir & à pratiquer. Mais au contraire, c'est vne vertu bien éleuée que celle qui oblige de descendre volontairement d'vn Trosne affermy, que celle qui fait haïr le monde, quand il ne nous fait voir que ce qu'il a d'agreable, qui nous le fait fuir quand il nous cherche, & enfin nous fait prendre & executer vne resolution cõme celle que la Reyne de Suede vient de suiure au milieu du triomphe & de la prosperité; Il n'appartenoit qu'à elle de se dépoüiller de la Souueraine authorité, quand tout ce qui dépendoit de la sienne luy estoit aussi soûmis par inclination que par deuoir, & on ne peut rien souhaiter à cette grande action si ce n'est que son motif ne soit pas purement moral, & que Dieu soit sa principle fin. Si la conuersion de cette Princesse couronne cette conduite admirable, on pourra dire auec verité, que iamais aucune créature n'aura esté reuestuë d'vne plus éclatante gloire; car enfin il ne se faut pas contenter de celle que nous pouuons acquerir en ce monde: Ce qu'il donne, & mesme ce qu'il promet n'est pas capable de satisfaire tousiours vn esprit éclairé & vn cœur genereux. C'est aussi ce qui doit faire esperer que vostre Maistresse sera vne Sainte aussi bien qu'vne Heroïne, on ne luy peut plus desirer que cela; & ie vous asseure que c'est de tout mon cœur que ie le souhaite, & à vous tout le bon-heur que i'ay tousiours pensé & dit que vous meritez.
De Moulins le 15-
Auril 1654.

With modernised spelling:

Vous m'avez fort obligé de m'avoir fait part de l'action héroïque de votre grande reine; en vérité, elle est incomparable, et on peut dire qu'en quittant une Couronne, elle se rend digne de porter toutes celles de la terre, et qu'en cessant de vouloir commander à ses sujets, elle mérite de commander à tout le monde. Rien n'est plus aisé que de l'abandonner quand il nous a exposé à une longue suite d'infortunes. Il n'est pas difficile de le mépriser quand il s'est montré à nous de son mauvais côté et que, par notre expérience, nous avons trouvé qu'il n'est rempli que d'infidélités, de faiblesses et de trahison. Je sens fort bien qu'en cet état, on peut chercher la solitude plutôt par amour-propre que par un détachement, malaisé à concevoir et à pratiquer. Mais, au contraire, c'est une vertu bien élevée que celle qui oblige de descendre volontairement d'un trône affermi que celle qui fait haïr le monde quand il ne nous fait voir que ce qu'il a d'agréable, qui nous le fait fuir quand il nous cherche, et, enfin, nous fait prendre et exécuter une résolution comme celle que la reine de Suède vient de suivre au milieu du triomphe et de la prospérité. Il n'appartenait qu'à elle de se dépouiller de la souveraine autorité quand tout ce qui dépendait de la sienne lui était aussi soumis par inclination que par devoir; et on ne peut rien souhaiter à cette grande action si ce n'est que son motif ne soit pas purement moral et que Dieu soit sa principle fin. Si la conversion de cette princesse couronne cette conduite admirable, on pourra dire avec vérité que jamais aucune créature n'aura été revêtue d'une plus éclatante gloire; car, enfin, il ne se faut pas contenter de celle que nous pouvons acquérir en ce monde. Ce qu'il donne, et même ce qu'il promet, n'est pas capable de satisfaire toujours un esprit éclairé et un cœur généreux. C'est aussi ce qui doit faire espérer que votre maîtresse sera une sainte aussi bien qu'une héroïne. On ne lui peut plus désirer que cela, et je vous assure que c'est de tout mon cœur que je le souhaite, et à vous tout le bonheur que j'ai toujours pensé et dit que vous méritez.
De Moulins, le 15 avril 1654.

Arckenholtz's transcript of the letter:

Vous m'avez fort obligé de m'avoir fait part de l'action héroique de votre grande Reine: en vérité elle est incomparable, & on peut dire qu'en quittant une Couronne, elle se rend digne de porter toutes celles de la Terre: & qu'en cessant de vouloir commander à ses Sujèts, elle mérite de commander à tout le monde. Rien n'est plus aisé que de l'abandonner quand il nous a exposé à une longue suite d'infortunes: il n'est pas difficile de le mépriser quand il s'est montré à nous de son mauvais côté, & que par notre expérience nous avons trouvé qu'il n'est rempli que d'infidélités, de foiblesses & de trahison. Je sens fort bien qu'en cet état on peut chercher la solitude plûtôt par amour propre, que par un détachement, malaisé à concevoir & à pratiquer. Mais au contraire, c'est une vertu bien élevée que celle qui oblige de descendre volontairement d'un Trône affermi, que celle qui fait haïr le monde, quand il ne nous fait voir que ce qu'il a d'agréable, qui nous le fait fuïr quand il nous cherche & enfin nous fait prendre & éxécuter une résolution comme celle que la Reine de Suède vient de suivre, au milieu du triomphe & de la prospérité: Il n'appartenoit qu'à elle, de se dépouiller de la souveraine Autorité, quand tout ce qui dépendoit de la sienne lui étoit aussi soumis par inclination que par devoir, & on ne peut rien souhaiter à cette grande action, si ce n'est que son motif ne soit pas purement moral, & que Dieu soit sa principle fin. Si la conversion de cette Princesse couronne cette conduite admirable, on pourra dire avec vérité, que jamais aucune créature n'aura été revêtuë d'une plus éclatante gloire. Car enfin il ne se faut pas contenter de celle que nous pouvons acquérir en ce monde: ce qu'il est & même ce qu'il promèt, n'est pas capable de satisfaire toûjours un esprit éclairé & un cœur généreux. C'est aussi ce qui doit faire espérer, que Votre Maitresse sera une Sainte aussi bien qu'une Héroine; on ne lui peut plus desirer que cela & je vous assure que c'est de tout mon cœur que je le souhaite.

English translation (my own):

You have greatly obliged me to have informed me of the heroic action of your great Queen; in truth she is incomparable, and one can say that by leaving a crown she makes herself worthy to wear all those of the earth. And that by ceasing to want to command her subjects, she deserves to command all the world. Nothing is easier than to abandon it when it has exposed us to a long series of misfortunes; it is not difficult to despise her when she has shown herself to us from her bad side, and our experience has found that it is filled with nothing but infidelities, weaknesses and betrayal. I feel very well that in this state one can seek solitude rather out of self-love than by a detachment, difficult to conceive and to practice. But on the contrary, it is a very high virtue that that which obliges one to descend voluntarily from a strengthened throne, that that which makes people hate the world, when it only shows us what is pleasant, which makes us hate, which makes it flee when it seeks us and finally makes us take and carry out a resolution like the one the Queen of Sweden has just followed, in the midst of triumph and prosperity. It was up to her alone to strip herself of the sovereign authority, when everything that depended on her was as subject to her by inclination as by duty, and nothing can be wished for in this great action, if not that its motive is not purely moral, and that God is its principle end. If the conversion of this princess crowns this admirable conduct, it can be said with truth that no creature has ever been clothed with a more dazzling glory. After all, we must not be content with what we can acquire in this world; what it is, and even what it promises, is not always capable of satisfying an enlightened mind and a generous heart. This is also what should give hope that your mistress will be a saint as well as a heroine; nothing more can be desired from her, and I assure you that I wish this with all my heart.


Above: Kristina.


Above: Anne-Geneviève of Bourbon-Condé, Madame de Longueville.


Above: Pierre Bourdelot.

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