Source:
Œuvres de Descartes, correspondance V: mai 1647-février 1650, page 182, published by Charles Adam and Paul Tannery, 1903
The letter:
Monsieur,
Vous mesurez merueilleusement bien les temps, car iustement i'ay trouué à la Haye, lors que i'estois en chemin pour venir icy, la lettre que vous vouliez que ie pusse receuoir auant mon partement de Hollande. Elle vint seulement en cela trop tard, que, m'estant proposé de partir le iour mesme qu'on me la rendit, ie fus contraint de differer ma réponse iusqu'à mon arriuée en cette ville. I'ay eu cependant tout le loisir de repasser par mon imagination la belle description que vous faites de cette chasse, où l'on porte des liures, & où vous me donnez esperance que mon écrit aura cette prerogatiue, au dessus de beaucoup d'autres, d'estre reueu par la Reine de Suede. La grande estime que ie fais de l'esprit de cette incomparable Princesse, me donne suiet d'apprehender que cét écrit ne luy puisse plaire, puis qu'ayant déia pris la peine de le voir, ainsi que vous me mandez qu'elle a fait, elle n'a pas voulu neantmoins vous en dire encore son sentiment. Mais ie me console sur ce que vous adioutez, qu'elle s'est proposée de le reuoir: car elle ne daigneroit pas s'arrester à cela, si elle n'y auoit rien trouué qu'elle approuuast. Et ie me flatte de cette opinion, que c'est plustost l'ordre, l'agencement & les ornemens de l'élocution qui y manquent, que non pas la verité des pensées; ce qui me fait esperer plus d'approbation de la seconde lecture que de la premiere. Vous direz peut-estre que ie me donne en cecy trop de vanité. Mais ie vous prie d'en attribuer la faute à l'air de Paris, plutost qu'à mon inclination: car ie croy vous auoir déia dit autrefois, que cét air me dispose à conceuoir des chymeres, au lieu de pensées de Philosophe. I'y voy tant d'autres personnes qui se trompent en leurs opinions & en leurs calculs, qu'il me semble que c'est vne maladie vniuerselle. L'innocence du desert d'où ie viens me plaisoit beaucoup dauantage, & ie ne croy pas que ie puisse m'empescher d'y retourner dans peu de temps. Mais en quelque lieu du monde que ie sois, ie vous prie de croire que vous y aurez, &c.
With modernised spelling:
Monsieur,
Vous mesurez merveilleusement bien les temps, car justement j'ai trouvé à la Haye, lorsque j'étais en chemin pour venir ici, la lettre que vous vouliez que je pusse recevoir avant mon partement de Hollande. Elle vint seulement en cela trop tard que, m'étant proposé de partir le jour-même qu'on me la rendit, je fus contraint de différer ma réponse jusqu'à mon arrivée en cette ville. J'ai eu cependant tout le loisir de repasser par mon imagination la belle description que vous faites de cette chasse, où l'on porte des livres, et où vous me donnez espérance que mon écrit aura cette prérogative, au-dessus de beaucoup d'autres, d'être revu par la Reine de Suède. La grande estime que je fais de l'esprit de cette incomparable princesse me donne sujet d'appréhender que cet écrit ne lui puisse plaire, puisqu'ayant déjà pris la peine de le voir, ainsi que vous me mandez qu'elle a fait, elle n'a pas voulu néanmoins vous en dire encore son sentiment. Mais je me console sur ce que vous ajoutez, qu'elle s'est proposée de le revoir; car elle ne daignerait pas s'arrêter à cela, si elle n'y avait rien trouvé qu'elle approuvât. Et je me flatte de cette opinion, que c'est plutôt l'ordre, l'agencement et les ornements de l'élocution qui y manquent, que non pas la vérité des pensées; ce qui me fait espérer plus d'approbation de la seconde lecture que de la première. Vous direz peut-être que je me donne en ceci trop de vanité. Mais je vous prie d'en attribuer la faute à l'air de Paris plutôt qu'à mon inclination, car je crois vous avoir déjà dit autrefois que cet air me dispose à concevoir des chimères au lieu de pensées de Philosophe. J'y vois tant d'autres personnes qui se trompent en leurs opinions et en leurs calculs qu'il me semble que c'est une maladie universelle. L'innocence du désert d'où je viens me plaisait beaucoup davantage, et je ne crois pas que je puisse m'empêcher d'y retourner dans peu de temps. Mais en quelque lieu du monde que je sois, je vous prie de croire que vous y aurez, etc.
Swedish translation (my own):
Monsieur,
Ni mäter tiden förunderligt väl, ty jag råkade hitta i Haag, när jag var på väg hit, det brev som Ni ville att jag skulle få innan min avresa från Holland. Det kom bara in som för sent att jag, efter att ha föreslagit mig själv att lämna samma dag som den lämnades tillbaka till mig, var tvungen att skjuta upp mitt svar tills jag kom till denna stad. Jag hade dock gott om tid att i min fantasi gå igenom den vackra beskrivning Ni ger av denna chasse, där böcker bärs, och där Ni ger mig hopp om att mitt författarskap kommer att ha detta privilegium, framför många andra, att ses igen av Sveriges drottning. Den stora aktning jag hyser för denna makalösa prinsessans sinne ger mig anledning att inse att denna skrift kanske inte behagar henne, eftersom hon redan har gjort sig besväret att se den, som Ni säger mig att hon har gjort, hon inte ville berätta om hennes känslor om det ännu. Men jag tröstar mig med det Ni tillägger, att hon tänkte se det igen; ty hon skulle inte förmå sig att stanna vid det, om hon inte hade funnit något i det som hon godkände. Och jag smickrar mig med denna åsikt, att det snarare är ordningen, arrangemanget och utsmyckningarna av elokutionen som saknas där än tankarnas sanning, som får mig att hoppas på mer bifall från andra behandlingen än från första. Ni kommer kanske att säga att jag ger mig själv för mycket fåfänga i detta. Men jag ber er att hänföra felet till Paris-luften snarare än till min böjelse, ty jag tror att jag redan tidigare har berättat för Er att denna luft får mig att föreställa mig chimärer istället för en Filosofs tankar. Jag ser så många andra människor som har fel i sina åsikter och sina beräkningar att det verkar som om det är en allmän sjukdom. Jag tyckte mycket mer om oskulden i öknen där jag kommer ifrån, och jag tror inte att jag kan hjälpa att åka tillbaka dit snart. Men var jag än är i världen ber jag Er att tro att Ni skall få, osv.
English translation (my own):
Monsieur,
You measure time marvellously well, for I happened to find at The Hague, when I was on my way here, the letter which you wanted me to receive before my departure from Holland. It only came in that too late that, I having proposed to myself to leave the very day that it was returned to me, I was constrained to defer my reply until my arrival in this town. However, I had plenty of time to go over in my imagination the beautiful description you give of this chasse, where books are carried, and where you give me hope that my writing will have this prerogative, above many others, to be seen again by the Queen of Sweden. The great esteem I have for the mind of this incomparable princess gives me reason to apprehend that this writing may not please her, since, her having already taken the trouble to see it, as you tell me she has done, she did not want to tell you her feelings about it yet. But I console myself with what you add, that she intended to see it again; for she would not deign to stop at that if she had not found anything in it that she approved of. And I flatter myself with this opinion, that it is rather the order, the arrangement and the ornaments of the elocution which are lacking there than the truth of the thoughts, which makes me hope for more approval from the second reading than from the first. You will perhaps say that I give myself too much vanity in this. But I beg you to attribute the fault to the air of Paris rather than to my inclination, for I believe I have already told you in the past that this air disposes me to conceive chimeras instead of the thoughts of a Philosopher. I see so many other people who are mistaken in their opinions and their calculations that it seems to me that it is a universal disease. I liked the innocence of the desert where I come from much more, and I do not think I can help going back there soon. But wherever I am in the world, I beg you to believe that you will have, etc.
Above: Kristina.
Above: René Descartes.
Note: Descartes wrote this letter while he was at Clerselier.
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