Thursday, November 5, 2020

Description of Kristina at the time of her/his/their visit to Paris, year 1656

Sources:

Recüeil des harangues qui ont esté faites à la reyne de Suede, page 236, published by Claude Bardin, 1660


Mémoires concernant Christine, volume 1, page 551, Johan Arckenholtz, 1751


The description:

MONSIEVR,
Il y aura de differens iugemens à la Cour sur cette Reyne Suedoise: Ie vous diray en peu de mots le mien. C'est vne fille de 30. ans qui a le visage beau & plus ieune que ses années: Elle a la voix d'vn homme, le port hautain & fier, mais mitigé d'vne douceur agreable, la taille petite qu'elle n'ayde pas du moindre secours du Cordonnier; Elle abhorre toute sorte de déguisement, ce qui est rare dans son sexe & dans sa condition. On dit que Tybere haïssoit également les flateurs & ceux qui luy parloient librement; celle-cy ne haït que les premiers, sans trouuer mauuais que l'on explique ses sentimens, mesme en ce qui touche sa personne: Elle se raille la premiere de l'inegalité de ses espaules, bien qu'elle ne soit pas fort remarquable: Elle est plus moderée à donner des loüanges que du blasme, mais tousiours elle éuite de dire les choses qui choquent; au contraire elle est portée aux obligeantes auec vne si honneste & si facile complaisance que l'on void bien qu'elle apprehende d'estre crainte; Elle connoist toutes les personnes considerables des principales villes & prouinces de l'Europe, & sçait ce qu'en disent les Eloges & les Satyres. Elle a l'esprit porté aux vertus heroïques & Royales, sur tout à la Iustice & à la liberalité: mais elle est comme ceux qui ont esté fort agiles & dispos qui sont deuenus paralytiques, ils peuuent discourir à propos des exercices, mais non pas les mettre en pratique: Elle a neanmoins tiré cét auantage de la genereuse & volontaire priuation de son opulence Royale qu'elle a montré & montre qu'elle sçait également bien posseder les richesses & s'empescher d'en estre possedée. Elle se dit estre de temperamment melancholique, ce qu'elle persuade mieux par ses ingenieuses & profondes meditations, que par la viuacité de son teint vermeil, par ses cheueux chastains clairs, & par sa conuersation enioüée & ambulante. Elle est sobre ne mangeant quasi que des fruits, n'vsant guere plus de viande & de poisson que si vn Pytagoricien estoit son Maistre d'Hostel, & beuuant non plus de vin que si elle venoit d'abiurer son Heresie entre les mains du Muphty. Elle ayme à parler & estre entretenuë d'vn style argu, serré & succint, qui dise en peu de mots beaucoup de bonnes choses. Les liures, les excellens tableaux, les statuës antiques & modernes des bons maistres, sont les perles, les diamans & autres precieux bijoux de son Cabinet; Et l'on peut dire auec verité que la charge de Maistre de sa Garderobe est la moins lucratiue & la plus inutile de sa maison. Son affection pour le mariage en general est égale à celle que le Pape Calixte eut pour celuy des Ecclesiastiques. Ce que i'ay peu remarquer en sa Religion, c'est qu'elle est fort esloignée de la superstition si detestée par les plus grands Chrestiens & les plus grands Philosophes. Elle admire ceux qui disputent de la Theologie auec opiniastreté, disant que quand on est vne fois persuadé, il faut demeurer dans vn respect profond, & [vne] entiere soûmission pour les poincts que les Papes ont decerné. Sa presence n'a point diminué le bruit de ses bonnes qualitez, au contraire elle l'a augmenté. La cognoissance des Langues viues & mortes, le beau sçauoir, l'vrbanité, la conuersation rafinée, plus rare au Nord que les Elephans, la promptitude des reparties, les termes exquis dans les Langues Françoise & Italienne, ont parû abondantes dans ses discours; Elle prononce la nostre sans aucun terme ny accent Prouincial, ce qui est si rare qu'il n'y a que fort peu de François naturels exempts de quelque prononciation municipale, I'ay souuent dit à la Reyne nostre Maistresse qu'elle estoit la seule Personne que i'eusse estudiée, de qui ie n'eusse iamais oüy paroles ny accent qui ne fussent dans la iustesse, & que ie donnois l'auantage de cette pureté, qu'elle a pardessus tous les autres, à ce que sa Majesté n'auoit appris le Françoise que dans la Cour, ou les termes & la prononciation sont les plus chastiez: Mais la Reyne de Suede en a pris la premiere institution à Stolkom d'vn Precepteur Liegeois, qui auoit fidelement conserué la diction & la prononciation de sa Patrie, qui l'emporte sur toutes les pernicieuses élocutions des Prouinces Valones. Ie ne luy ay point oüy parler d'autres, mais bien répondre tres-pertinement & montrer qu'elle a l'intelligence tres-complette. Elle éuite fort soigneusement de paroistre sçauante, & i'ay opinion qu'elle a peur qu'on l'aye depeinte pour vne pedantesse, mais son sçauoir & sa capacité paroissent au trauers des nuages dont elle veut obscurcir ses belles lumieres: Par exemple quelqu'vn ayant nommé Homere & Virgile, elle ne peust s'empescher de dauber (c'est son mot) sur les Heros de l'vn & de l'autre: du premier, sur ce qu'il se console incontinent auec sa fluste, de la grande affliction qu'il auoit d'auoir perdu sa Maistresse, & l'autre de ce qu'ayant quarante ans sur la teste, il est aussi inseparable de sa Nourice que s'il tetoit encores. Ie ne l'ay point oüy iurer, & ie me persuade que ce qu'on en dit est vne imposture de ses ennemis. Quant aux paroles obscenes, ie n'ay veu aucun qui m'aye assuré luy en auoir oüy proferer. Il ne faut pas iuger de cette Ame releuée au dessus des autres par les regles prescrites à celles du commun; C'est vne Philosophe qui n'a rien de femme que le Sexe, son Esprit estant tellement porté à la franchise, qu'elle n'a iamais sçeu le soumettre aux grimaces necessaires pour joüer la farce feminine: ny mesme porter les habits pour la representer; Elle a enuisagé le monde auec vne resolution masle & virile qui luy a fait mespriser effectiuement les Sceptres & les richesses, & mettre en pratique cette haute Philosophie, dont les plus rigides Professeurs & plus austeres Anachoretes n'ont peu auoir que la Theorie, Il ne faut donc pas s'estonner si elle est éloignée du grand chemin le croyant auec tous les plus sages de tous les Siecles & de toutes les Nations trop long & trop fangeux pour arriuer au Souuerain bien, auquel on ne paruient que par les sentiers difficiles & peu battus, par où la Vertu debarassée chemine & fait sa route. Parmy tout ce mespris des ornemens exterieurs il est merueilleux de voir cette Princesse faite de telle sorte, qu'à moins d'vne chasteté canonizable, la Reyne de Saba auroit trouué son Salomon.

With modernised spelling:

Monsieur,
Il y aura de différents jugements à la cour sur cette reine suédoise; je vous dirai en peu de mots le mien. C'est une fille de 30 ans qui a le visage beau et plus jeune que ses années. Elle a la voix d'un homme, le port hautain et fier (mais mitigé d'une douceur agréable), la taille petite, qu'elle n'aide pas du moindre secours du cordonnier. Elle abhorre toute sorte de déguisement, ce qui est rare dans son sexe et dans sa condition. On dit que Tibère haïssait également les flatteurs et ceux qui lui parlaient librement; celle-ci ne haït que les premiers, sans trouver mauvais que l'on explique ses sentiments, même en ce qui touche sa personne. Elle se raille la première de l'inégalité de ses épaules, bien qu'elle ne soit pas fort remarquable.

Elle est plus modérée à donner des louanges que du blâme, mais toujours elle évite de dire les choses qui choquent; au contraire, elle est portée aux obligeantes avec une si honnête et si facile complaisance que l'on voit bien qu'elle appréhende d'être crainte. Elle connaît toutes les personnes considérables des principales villes et provinces de l'Europe et sait ce qu'en disent les éloges et les satires. Elle a l'esprit porté aux vertus héroïques et royales, surtout à la justice et à la libéralité; mais elle est comme ceux qui ont été fort agiles et dispos qui sont devenus paralytiques: ils peuvent discourir à propos des exercices, mais non pas les mettre en pratique. Elle a néanmoins tiré cet avantage de la généreuse et volontaire privation de son opulence royale qu'elle a montré et montre qu'elle sait également bien posséder les richesses et s'empêcher d'en être possedée.

Elle se dit être de tempérament mélancolique, ce qu'elle persuade mieux par ses ingénieuses et profondes méditations, que par la vivacité de son teint vermeil, par ses cheveux châtains clairs, et par sa conversation enjouée et ambulante. Elle est sobre, ne mangeant quasi que des fruits, n'usant guère plus de viande et de poisson que si un Pythagoricien était son maître d'hôtel, et buvant non plus de vin que si elle venait d'abjurer son hérésie entre les mains du Mufti. Elle aime à parler et être entretenue d'un stile aigu, serré et succint, qui dise en peu de mots beaucoup de bonnes choses. Les livres, les excellents tableaux, les statues antiques et modernes des bons maîtres sont les perles, les diamants et autres précieux bijoux de son cabinet; et l'on peut dire avec vérité que la charge de maître de sa garderobe est la moins lucrative et la plus inutile de sa maison.

Son affection pour le mariage en general est égale à celle que le pape Calixte eut pour celui des ecclésiastiques. Ce que j'ai pu remarquer en sa religion, c'est qu'elle est fort éloignée de la superstition si détestée par les plus grands chrêtiens et les plus grands philosophes. Elle admire ceux qui disputent de la théologie avec opiniâtreté, disant que quand on est une fois persuadé, il faut demeurer dans un respect profond et une entière soumission pour les points que les papes ont décerné. Sa présence n'a point diminué le bruit de ses bonnes qualités: au contraire, elle l'a augmenté.

La connaissance des langues vives et mortes, le beau savoir, l'urbanité, la conversation rafinée, plus rare au Nord que les éléphants, la promptitude des reparties, les termes exquis dans les langues française et italienne, ont paru abondantes dans ses discours. Elle prononce la nôtre sans aucun terme ni accent provincial, ce qui est si rare qu'il n'y a que fort peu de Français naturels exempts de quelque prononciation municipale. J'ai souvent dit à la Reine, notre maîtresse, qu'elle était la seule personne que j'eusse étudiée de qui je n'eusse jamais ouï paroles ni accent qui ne fussent dans la justesse, et que je donnais l'avantage de cette pureté qu'elle a par-dessus tous les autres, à ce que Sa Majesté n'avait appris la française que dans la cour, où les termes et la prononciation sont les plus chastiés. Mais la Reine de Suède en a pris la première institution à Stockholm d'un précepteur liégeois qui avait fidèlement conservé la diction et la prononciation de sa patrie, qui l'emporte sur toutes les pernicieuses élocutions des provinces valones. Je ne lui ai point ouï parler d'autres, mais bien répondre très pertinemment et montrer qu'elle a l'intelligence très complète.

Elle évite fort soigneusement de paraître savante, et j'ai opinion qu'elle a peur qu'on l'aie depeinte pour une pedantesse, mais son savoir et sa capacité paraissent au travers des nuages dont elle veut obscurcir ses belles lumières. Par exemple, quelqu'un ayant nommé Homère et Virgile, elle ne put s'empêcher de dauber (c'est son mot) sur les héros de l'un et de l'autre: du premier, sur ce qu'il se console incontinent avec sa flûte de la grande affliction qu'il avait d'avoir perdu sa maîtresse, et l'autre de ce qu'ayant quarante ans sur la tête, il est aussi inséparable de sa nourrice que s'il tétait encores.

Je ne l'ai point ouï jurer, et je me persuade que ce qu'on en dit est une imposture de ses ennemis. Quant aux paroles obscènes, je n'ai vu aucun qui m'aie assuré lui en avoir ouï proférer.

Il ne faut pas juger de cette âme rélèvée au-dessus des autres par les règles prescrites à celles du commun. C'est une philosophe qui n'a rien de femme que le sexe, son esprit étant tellement porté à la franchise, qu'elle n'a jamais su le soumettre aux grimaces nécessaires pour jouer la farce feminine, ni même porter les habits pour la représenter. Elle a envisagé le monde avec une résolution mâle et virile qui lui a fait mépriser effectivement les sceptres et les richesses, et mettre en pratique cette haute philosophie, dont les plus rigides professeurs et plus austères anachorètes n'ont pu avoir que la théorie.

Il ne faut donc pas s'étonner si elle est éloignée du grand chemin, le croyant avec tous les plus sages de tous les siècles et de toutes les nations trop long et trop fangeux pour arriver au souverain bien, auquel on ne parvient que par les sentiers difficiles et peu battus, par où la vertu debarrassée chemine et fait sa route. Parmi tout ce mépris des ornements extérieurs, il est merveilleux de voir cette princesse faite de telle sorte, qu'à moins d'une chasteté canonisable, la reine de Saba aurait trouvé son Salomon.

Arckenholtz's transcript of the description:

Monsieur,
Il y aura de différens jugemens à la Cour sur cette Reine Suédoise: je vous dirai en peu de mots le mien. C'est une fille de trente ans, qui a le visage beau, & plus jeune que ses années: Elle a la voix d'un homme, le port hautain & fier; mais mitigé d'une douceur agréable, la taille petite qu'elle n'aide pas du moindre secours du Cordonnier: Elle abhorre toute sorte de déguisement, ce qui est rare dans son sexe, & dans sa condition. On dit, que Tibére haïssoit également les flatteurs & ceux qui lui parloient librement: celle-ci ne haït que les prémiers, sans trouver mauvais que l'on explique ses sentimens, même en ce qui touche sa personne. Elle se raille la prémière de l'inégalité de ses épaules, bien qu'elle ne soit pas fort remarquable. Elle est plus modérée à donner des louanges que du blâme, mais toûjours elle évite de dire les choses qui choquent, au contraire elle est portée aux obligeantes, avec une si honnête & si facile complaisance que l'on voit bien qu'elle appréhende d'être crainte; Elle connoit toutes les personnes considérables des principales villes & Provinces de l'Europe, & sait ce qu'en disent les Eloges & les Satires. Elle a l'esprit porté aux vertus héroïques & Roïales, sur tout à la justice & à la libéralité: mais elle est comme ceux qui ont été fort agiles & dispos, qui sont devenus paralytiques, ils peuvent discourir à propos des éxercices, mais non pas les mettre en pratique: Elle a néanmoins tiré cet avantage de la généreuse & volontaire privation de son opulence Roïale, qu'elle a montré & montre qu'elle sait également bien posséder les richesses, & s'empêcher d'en être possédée. Elle se dit être de tempérament mélancolique, ce qu'elle persuade mieux par ses ingénieuses & profondes méditations, que par la vivacité de son teint vermeil, par ses cheveux chastains clairs, & par sa conversation enjouée & ambulante. Elle est sobre, ne mangeant quasi que des fruits, n'usant guéres plus de viande & de poisson que si un Pythagoricien étoit son Maitre d'Hôtel, & bûvant non plus de vin que si elle venoit d'abjurer son Hérésie entre les mains du Muphti. Elle aime à parler & être entretenuë d'un stile aigu, serré & succint, qui dise un peu de mots beaucoup de bonnes choses. Les livres, les excellens tableaux, les statuës antiques & modernes des bons Maitres, sont les perles, les diamans & autres précieux bijoux de son Cabinèt; & l'on peut dire avec vérité que la charge de Maitre de sa Garde-robe, est la moins lucrative & la plus inutile de sa Maison. Son affection pour le mariage en général, est égale à celle que le Pape Calixte eut pour celui des Ecclésiastiques. Ce que j'ai pû remarquer en sa Religion, c'est qu'elle est fort éloignée de la superstition, si détestée par les plus grands Chrêtiens & les plus grands Philosophes. Elle admire ceux qui disputent de la Théologie avec opiniâtreté, disant, que quand on est une fois persuadé, il faut demeurer dans un respect profond, & une entiére soumission pour les points que les Papes ont décernés. Sa présence n'a point diminué le bruit de ses bonnes qualités, au contraire elle l'a augmenté. La connoissance des langues vives & mortes, le beau savoir, l'urbanité, la conversation rafinée, plus rare au Nord que les Eléphans, la promptitude des reparties, les termes exquis dans les langues Françoise & Italienne, ont parû abonder dans ses discours; Elle prononce la notre sans aucun terme ni accent provincial, ce qui est si rare qu'il n'y a que fort peu de François naturels éxempts de quelque prononciation municipale. J'ai souvent dit à la Reine notre Maitresse, qu'elle étoit la seule Personne que j'eusse étudiée, de qui je n'eusse jamais oui paroles ni accent qui ne fussent dans la justesse, & que je donnois l'avantage de cette pureté, qu'elle a par-dessus tous les autres, à ce que Sa Majesté n'avoit appris le Françoise que dans la Cour, où les termes & la prononciation sont les plus châtiés. Mais la Reine de Suède en a pris la prémière institution à Stockholm, d'un Précepteur Liégeois, qui avoit fidellement conservé la diction & la prononciation de sa Patrie, qui l'emporte sur toutes les pernicieuses élocutions des provinces Valones. Je ne lui ai point oui parler d'autres: mais bien répondre très-pertinemment, & montrer qu'elle a l'intelligence très-complette. Elle évite fort soigneusement de paroitre savante, & j'ai opinion qu'elle a peur qu'on l'ait dépeinte pour une Pédante. Mais son savoir & sa capacité paroissent au travers des nuages, dont elle veut obscurcir ses belles lumiéres: Par éxemple quelqu'un aïant nommé Homére & Virgile, elle ne pût s'empêcher de dauber (c'est son mot) sur les Héros de l'un & de l'autre, du prémier, sur ce qu'il se console incontinent avec sa flute, de la grande affliction qu'il avoit d'avoir perdu sa Maitresse, & l'autre de ce qu'aïant quarante ans sur la tête, il est aussi inseparable de sa Nourrice, que s'il tétoit encore. Je ne l'ai point oui jurer, & je me persuade que ce qu'on en dit, est une imposture de ses ennemis. Quant aux paroles obscénes, je n'ai vû aucun qui m'ait assuré lui en avoir ouï proférer. Il ne faut pas juger de cette ame rélevée au-dessus des autres, par les règles préscrites à celles du commun; c'est une Philosophe qui n'a rien de femme que le sexe, son Esprit étant tellement porté à la franchise, qu'elle n'a jamais sû le soumettre aux grimaces nécessaires pour jouer la farce feminine, ni même porter les habits pour la représenter; Elle a envisagé le monde avec une résolution mâle & virile, qui lui a fait mépriser effectivement les Sceptres & les richesses, & mettre en pratique cette haute Philosophie, dont les plus rigides Professeurs & plus austéres Anachorétes n'ont pû avoir que la théorie. Il ne faut donc pas s'étonner si elle est éloignée du grand chemin, le croïant, avec tous les plus sages de tous les siécles, & de toutes les Nations, trop long & trop fangeux pour arriver au souverain bien, auquel on ne parvient que par les sentiers difficiles & peu battus, par où la vertu débarassée chemine & fait sa route. Parmi tout ce mépris des ornemens extérieurs, il est merveilleux de voir cette Princesse faite de telle sorte, qu'à moins d'une chasteté canonizable, la Reine de Saba auroit trouvé son Salomon.

English translation (my own):

Monsieur,
There will be different judgments at court on this Swedish queen; I will tell you mine in a few words. She is thirty years old, with a beautiful face and younger than her years. She has the voice of a man, her bearing is haughty and proud, but mixed with a pleasant softness, her size is so small that she does not need the slightest help from the shoemaker. She abhors any kind of disguise, which is rare in her sex and in her condition. It is said that Tiberius also hated flatterers and those who spoke to him freely; this one hates only the former, without finding it bad that one explains his feelings, even in what touches his person. She is the first to laugh at the unevenness of her shoulders, although it is not very remarkable. She is more moderate in giving praise than blame, but she always avoids saying things that shock; on the contrary, she is taken to obliging, with such honest and easy complacency that one can see that she is apprehensive of being feared. She knows all the great people of the main cities and provinces of Europe and knows what the praises and satires say about them. She has a mind drawn to heroic and royal virtues, above all to justice and liberality, but she is like those who have been very agile and ready, who have become paralytic, they can speak about exercises, but not not put them into practice. She nevertheless derived this advantage from the generous and voluntary deprivation of her royal opulence, which she has shown and shows that she also knows how to possess wealth and still prevent herself from being possessed by it.

She claims to be of a melancholy temperament, which she persuades better by her ingenious and profound meditations than by the liveliness of her ruddy complexion, by her light chaste hair, and by her lively and ambulant conversation. She is sober, eating almost nothing but fruit, hardly eating more meat and fish than if a Pythagorean was her butler, and nor does she drink wine unless she had just abjured her heresy into the hands of a mufti. She likes to talk and be entertained in a sharp, tight, and succinct style that says just a few words about a lot of good things. The books, the excellent paintings, the ancient and modern statues of the good masters are the pearls, the diamonds and other precious jewels of her cabinet; and one can say with truth that the office of master of her wardrobe is the least lucrative and the most useless of her household. Her affection for marriage in general is equal to that which Pope Callistus had for that of ecclesiastics. What I have noticed in her religion is that she is very far from superstition, so hated by the greatest Christians and the greatest philosophers. She admires those who stubbornly dispute theology, saying that when one is once persuaded, one must remain in deep respect and entire submission for the points the Popes have awarded. Her presence did not diminish the noise of her good qualities, on the contrary it increased it.

The knowledge of both living and dead languages, the beautiful knowledge, the urbanity, the refined conversation, rarer in the North than elephants, the promptitude of the repartees, the exquisite terms in the French and Italian languages, seemed to abound in her speech. She pronounces our language without any provincial terms or accent, which is so rare that there are very few natural Frenchmen without any municipal pronunciation. I have often said to the Queen, our mistress, that she was the only person I had studied from whom I never had either words or an accent that were not correct, and that I gave the advantage of this purity, which she has above all the others, that Her Majesty had only learned French at court, where the terms and pronunciation are the most chastised. But the Queen of Sweden took it as the first instruction in Stockholm of a tutor from Liège, who had faithfully preserved the diction and pronunciation of his country, which prevailed over all the pernicious elocutions of the Walloon provinces. I did not speak to her of others, but to answer very effectively, and to show that she has a very complete intelligence.

She very carefully avoids appearing scholarly, and I think she is afraid that someone has portrayed her as a pedant. But her knowledge and her capacity appear through the clouds, whose beautiful lights she wants to obscure. For example: someone having mentiomed Homer and Virgil, she could not help but chuckle (that is her word) at the heroism of one and at the other, the former, for how he consoles himself incontinent with his flute due to the great affliction he had at having lost his mistress, and the other because, being forty years old on his head, he is as inseparable from his nurse as if he was still nursing. I did not judge this to be affirmative, and I am convinced that what is said about her is an imposture on the part of her enemies.

As for the obscene words, I saw no one who assured me that they had heard her utter them. We must not judge this soul raised above others by the rules prescribed to those of the common people; she is a philosopher who has nothing feminine but her sex, her mind being so drawn to frankness that she has never been able to submit it to the grimaces necessary to play the feminine farce, nor even to wear the dresses to represent it. She looked at the world with a male and virile resolution, which made her actually despise scepters and riches, and put into practice this lofty philosophy, of which the most rigid professors and the most austere anchorites could only have the theory. So we should not be surprised if she is far from the high road, believing it, with all the wisest of all centuries, and of all nations, too long and too muddy to arrive at the sovereign good, which we do not achieve that by difficult and little beaten paths, by which the dispossessed virtue walks and makes its way. Amidst all this contempt for exterior adornments, it is marvelous to see this princess made in such a way that, barring a canonisable chastity, the Queen of Sheba would have found her Solomon.

Swedish translation of the original (my own):

Monsieur,
Det kommer att bli olika domar vid hovet om denna svenska drottning; jag skall berätta min med några få ord. Hon är en flicka på 30 år som har ett vackert ansikte som är yngre än hennes år. Hon har en mansröst, en högmodig och stolt hållning (men mildrat av en behaglig sötma), en liten kroppsbyggnad, som hon inte avhjälper med minsta hjälp från skomakaren. Hon avskyr all form av förklädnad, vilket är sällsynt hos hennes kön och tillstånd. Det sägs att Tiberius lika hatade smickrare och de som talade fritt till honom; denna dam hatar bara den förra utan att tycka att det är dåligt för en att förklara sina känslor, även i det som rör hennes person. Hon är den första som skämtar om ojämnheten hos hennes axlar, även om den inte är särskilt anmärkningsvärd.

Hon är mer måttfull när det gäller att ge beröm än att skylla på, men ändå undviker hon att säga saker som kränker; tvärtom, hon är angelägen om att förplikta människor med så ärlig och lätt behaglighet att det är lätt att se att hon fruktar att bli fruktad. Hon känner alla viktiga personer i Europas främsta städer och provinser och vet vad lovord och satirer säger om dem. Hennes sinne var benäget till heroiska och kungliga dygder, särskilt till rättvisa och liberalitet; men hon är som de som en gång var väldigt smidiga och aktiva men som blivit förlamade: de kan tala om övningarna, men inte omsätta dem i praktiken. Denna fördel fick hon likväl från det generösa och frivilliga berövandet av sin kungliga överflöd som hon har visat och fortfarande visar att hon vet hur hon kan besitta rikedomen lika väl som att hindra sig själv från att bli besatt av den.

Hon säger sig ha ett melankoliskt temperament, som hon övertygar en om bättre genom sina geniala och djupgående meditationer än genom livligheten i hennes rödbruna hy, hennes kastanjebruna hår och hennes lekfulla och ambulerande samtal. Hon är nykter, äter nästan ingenting annat än frukt, använder knappt mer kött och fisk än om en pytagorean vore hennes maître d'hôtel, och dricker inte mer vin än om hon just hade avvärjt sin kätteri i händerna på muftin. Hon gillar att tala och att talas vid med en skarp, stram och kortfattad stil som säger många bra saker med få ord. Böcker, utmärkta målningar och gamla och moderna statyer av goda mästare är pärlor, diamanter och andra dyrbara juveler i hennes studie; och det kan med sanning sägas att ämbetet som mästare av hennes garderob är det minst lukrativa och det mest värdelösa i hennes hushåll.

Hennes tillgivenhet för äktenskapet i allmänhet är lika med den som påven Kallistus hade för kyrkligheternas. Vad jag har kunnat lägga märke till i hennes religion är att den är väldigt långt ifrån den vidskepelse som så avskys av de största kristna och de största filosoferna. Hon beundrar dem som envist ifrågasätter teologi och säger att när man en gång är övertalad måste man förbli i djup respekt och fullständig underkastelse för de poäng som påvarna har tilldelat. Hennes närvaro har inte minskat larmen om hennes goda egenskaper: tvärtom, har hon ökat det.

Kunskapen om levande och döda språk, den stora kunskapen, urbaniteten, det förfinade samtalet, som är sällsyntare i Norden än elefanter, samtalets snabbhet, de utsökta orden på franska och italienska språken, förekom rikligt i hennes diskurser. Hon uttalar vårt språk utan något provinsiellt ord eller accent, vilket är så sällsynt att det finns mycket få naturliga fransmän som är undantagna från något kommunalt uttal. Jag har ofta sagt till drottningen, vår härskarinna, att hon var den enda person som jag hade studerat från vilken jag aldrig hade hört ord eller accent som inte stämde, och att jag gav fördelen av den renhet som hon framför allt har andra, i det att Hennes Majestät endast hade lärt sig franska vid hovet, där termer och uttal är de mest kyska. Men Sveriges drottning tog den första inrättningen av den i Stockholm av en preceptor från Liège, som troget hade bevarat sitt lands diktion och uttal, som råder över alla vallonska provinsernas fördärvliga elokutioner. Jag hörde henne inte tala om andra, men hon svarade mycket relevant och visade att hon har en mycket fullständig ingenium.

Hon undviker mycket noga att framstå som lärd och jag har den uppfattningen att hon är rädd att hon har framställts som pedantisk, men hennes kunskap och hennes förmåga framträder genom molnen med vilka hon vill skymma sina vackra ljus. Till exempel, när någon nämnde Homeros och Vergilius, kunde hon inte låta bli att slå (detta är hennes ord) hjältarna hos den ene och den andra: av den första, med vad han omedelbart tröstar sig med sin flöjt av den stora lidande han kände efter att ha förlorat sin härskarinna, och det andra av det faktum att han vid fyrtio år gammal är lika oskiljaktig från sin amma som om han fortfarande skulle di.

Jag har inte hört henne svära, och jag är övertygad om att det som sägs om henne är ett bedrägeri av hennes fiender. När det gäller otuktiga ord, såg jag ingen som försäkrade mig att de hade hört dem uttalas.

Vi får inte döma denna själ som är upphöjd över de andra efter de regler som föreskrivs för allmogen. Hon är en filosof som inte har något av en kvinna än sitt kön, hennes sinne är så uppriktigt att hon aldrig har kunnat utsätta det för de grimaser som är nödvändiga för att spela den kvinnliga farsen, och inte ens bära kläderna för att representera den. Hon begrundade världen med en manlig och viril beslutsamhet som fick henne att effektivt förakta sceptrar och rikedomar, och att omsätta den upphöjda filosofi som de mest rigida professorerna och de mest strama ankariterna bara kunde ha haft teorin om.

Vi bör därför inte bli förvånade om hon är långt från huvudvägen, och tror att det med alla de klokaste av alla åldrar och av alla nationer är för lång och för lerig för att komma fram till den suveräna godheten, som endast kan nås av de svåra och sällsynt gångna stigar, längs vilka den befriade dygden går och tar sig fram. Mitt i allt detta förakt för yttre prydnadsföremål är det fantastiskt att se denna prinsessa gjord på ett sådant sätt att drottningen av Saba, utan kanoniserbar kyskhet, skulle ha funnit sin Salomo.

English translation of the original (my own):

Monsieur,
There will be different judgments at court on this Swedish queen; I will tell you mine in a few words. She is a girl of 30 years who has a beautiful face that is younger than her years. She has a man's voice, a haughty and proud bearing (but mitigated by a pleasant sweetness), a small stature, which she does not help with the slightest succour from the shoemaker. She abhors any kind of disguise, which is rare in her sex and in her condition. It is said that Tiberius equally hated flatterers and those who spoke freely to him; this lady only hates the former without finding it bad for one to explain one's feelings, even in what concerns her person. She is the first to joke about the unevenness of her shoulders, although it is not very remarkable.

She is more moderate in giving praise than blame, but still she avoids saying things that offend; on the contrary, she is given to obliging people with such honest and easy complaisance that it is easy to see that she apprehends being feared. She knows all the important people of the principal cities and provinces of Europe and knows what eulogies and satires say about them. Her mind was inclined to heroic and royal virtues, especially to justice and liberality; but she is like those who were once very agile and active but who have become paralysed: they can talk about the exercises, but not put them into practice. She nevertheless derived this advantage from the generous and voluntary deprivation of her royal opulence which she has showed and still shows that she knows how to possess wealth equally as well as preventing herself from being possessed by it.

She claims to be of a melancholy temperament, which she persuades one of better by her ingenious and profound meditations than by the liveliness of her ruddy complexion, her chestnut-brown hair, and her playful and itinerant conversation. She is sober, eating almost nothing but fruit, using scarcely more meat and fish than if a Pythagorean were her butler, and drinking no more wine than if she had just abjured her heresy at the hands of of the Mufti. She likes to speak and to be spoken with in a sharp, tight and succinct style which says many good things in few words. Books, excellent paintings, and ancient and modern statues by good masters are the pearls, diamonds and other precious jewels of her study; and it may be said with truth that the office of master of her wardrobe is the least lucrative and the most useless in her household.

Her affection for marriage in general is equal to that which Pope Callistus had for that of ecclesiastics. What I have been able to notice in her religion is that it is very far from the superstition so detested by the greatest Christians and the greatest philosophers. She admires those who stubbornly dispute theology, saying that when one is once persuaded, one must remain in deep respect and complete submission for the points that the popes have awarded. Her presence has not diminished the noise about her good qualities: on the contrary, she has increased it.

The knowledge of living and dead languages, the great knowledge, the urbanity, the refined conversation, which are rarer in the North than elephants, the promptness of the repartee, the exquisite terms in the French and Italian languages, appeared abundant in her discourses. She pronounces our language without any provincial word or accent, which is so rare that there are very few natural Frenchmen exempt from some municipal pronunciation. I have often said to the Queen, our mistress, that she was the only person whom I had studied from whom I had never heard words or accent which were not in tune, and that I gave the advantage of that purity which she has above all others, in that Her Majesty had learned French only at court, where terms and pronunciation are the most chaste. But the Queen of Sweden took the first institution of it in Stockholm from a tutor from Liège, who had faithfully preserved the diction and pronunciation of his country, which prevails over all the pernicious elocutions of the Walloon provinces. I did not hear her speak of others, but she answered very pertinently and showed that she has a very complete intelligence.

She very carefully avoids appearing learned, and I have the opinion that she is afraid that she has been depicted as pedantic, but her knowledge and her ability appear through the clouds with which she wants to obscure her beautiful lights. For example, when someone mentioned Homer and Virgil, she could not help but strike (this is her word) the heroes of one and the other: of the first, on what he consoles himself immediately with his flute of the great affliction he felt at having lost his mistress, and the other of the fact that at forty years old, he is as inseparable from his nurse as though he were still suckling from her.

I have not heard her swear, and I am persuaded that what is said about her is an imposture of her enemies. As for obscene words, I saw none who assured me that they had heard them uttered.

We must not judge this soul raised above the others by the rules prescribed to those of the common people. She is a philosopher who has nothing of a woman but her sex, her mind being so given to frankness that she has never been able to subject it to the grimaces necessary to play the feminine farce, nor even wear the clothes to represent it. She contemplated the world with a male and virile resolution which made her effectively despise scepters and riches, and to put into practice that lofty philosophy of which the most rigid professors and most austere anchorites could only have had the theory.

We should not therefore be surprised if she is far from the main road, believing it with all the wisest of all ages and of all nations too long and too muddy to arrive at the sovereign good, which can only be reached by the difficult and little-trodden paths, along which the freed virtue walks and makes its way. Amidst all this contempt for outward ornaments, it is marvelous to see this princess made in such a way that, short of canonisable chastity, the Queen of Sheba would have found her Solomon.


Above: Kristina.

Note: The remark about Kristina looking much younger than her then-near age of 30 could be a sign that she might have been autistic, since autistic people are known to seem much younger than their actual age either physically or emotionally, although it could of course just be coincidence in her/his/their case. Kristina's having an extremely strong sense of justice and virtue is a more likely indicator of possible autism.

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