Saturday, October 16, 2021

Kristina's letter to Azzolino, dated January 30/February 9 (New Style), 1667

Sources:

Christine de Suède et le cardinal Azzolino: Lettres inédites (1666-1668), Carl Bildt, 1899








Kristina wrote this letter to Cardinal Decio Azzolino on January 30/February 9 (New Style), 1667.

The letter:

quarante septiesme
lestre du 9 febr. 1667
Vostre lestre du 15 Janvier me fait Conoistre me fait Conoistre que Vous estes enfin devenu saint tout de bon et Je men reiouẏs avec Vous. Vous promett de travallier durant Vostre Vie aux proces — de Vostre Cannonisation a Condition quapres ma mort Vous travalliez au mien, et pour repondre a Vostre predication Je Vous diray seullement que ie say ce que ie dois a dieu a Vous et a moy et tacheray de men aquitter.

Vous avez prix laffaire du medecin dune maniere qui mauroit surprix en vn austre temps, mais sachant que Vous estes devot Cela ne me surprent plus Car Cest leffect de la devotion daccuser dieu de touts les sotises que font les hommes, mais moy qui ne suis pas si enfonce dans la devotion que Vous ie prens tout Cela dune austre maniere. le medecin se trompe fort sil Croit destre retabli dan mes bonne graces, Jl ne lest pas et ne les sera iamais et ne merite pas de lestre, mais Je say dissimuler, et le laisseray dans son erreur iusques au temps quil sera a propos de len desabuser pour faire Conoistre aux gens quil y a des fautes qui ne se pardonne iamais, et Celle du medecin est de cette nature et Vous la iugeriez telle si Vous nestiez devot ou saint ou si Vous neussiez interest quon Vous Creut tell

Jay Veu la liste des tableaux du feu Carlo Jmperial et ie tremble de Crainte quil ne meschappe. Je Vous remercie du soin que Vous avez prix de me les achetter et Jame mieux de trouver a mon retour (sil arrive Jamais) les tableaux que largent, Car Jespere de nen manquer pas, et Je suis fort oblige a nostre Jmperial qui me Veut donner la preferance au Roy de france.

Samedy passe D. Carlo Conti mourut apres une maladie de sinque mois qui na Jamais este Conneu du medicin. Jl ma donne peu d'Edification durant sa Vie, et moins en sa mort. dieu face grace et miseriCorde a sa pauvre asme. D. Arbostino a donne en cette occasion toutte les preuves du plus grandt et du plus sot animal du monde, et Je ne Crains la mort en ce lieuxx que pour avoir le malheur de mourir entre les mains de cette beste. le pere Gaspar Jesuite la assiste avec toutte la Charite et tout le Zéle qui est ordinaire aux peres de sa Religion, mais le pauvre homme ne sachant parler que latin n'a peu san acquiter Comme Jl auroit fait sil eust seu parler Jtalien. en fin Jl luy a donne tout les sacrements de leglise dont Jl auroit este prive par la faute et dapocagine de D. Arbostino, si le pere gaspar nen eust plus de que luy. J'en ay eu la plus grande douleur du monde, Car quelque soin que iay prix a le faire bien servir tan povr le Corps que pour lasme Jl me semble quil a manque du Coste de lasme de aydes que ie luy auroy desire, et Jayroy paye en Cette occasion quelque grande some dargent pour avoir le pere fotio ycy. nous avons icy le pauvre pere pietro qui est ausi mourant dune longe maladie et dune espece d'hẏdropisie. Jl meurt Comme un Vray Ange et ie Crois quil yra doit en paradis. Jl a travallie quantorse annes pour nostre religion a fait beaucoup de fruit, mais ses annes et ses indispositions lont rendu depuis quelque temps inhabile. Jl seroit a souhaitter que la place fust remplie dun homme ausi Capable et Vertueux quil a este, Car lon en a grande necssite en ce pays

les Couriers de Suede ne sont plus arrive depuis les derniere lestres que ie Vous ay envoye dAdamy et les Curiers dycy ne peuvent non plus passer la mer de sorte quil faut avoir pacience pour nouvelle de Suede Cet accident est si rare quon nen a point dexemple et me donne mille supsons pour avoy eu depuis ce temps trois Couriers de Dannemarque de Ceux qui ont acoustume de Venir deux foix la semaine mais san lestre de Suede, Ce qui fortifie mes supsons. mais le temps les esclairsira et Jl faut avoir pacience

Jl ny a rien de nouveaux tout est paisible en ses lieux on tient la paix d'Agneterre avc ollandt et france Comme asseure. lempereur fait a ce quon dit des grandes leves, le roy de france de grandes reveues lon ne sait a quelle fin pour moy ie iuge que lun est laustre a ces desseins sur la polonge et Je tiens linterest de la maison dAustriche en meillieur estat que celluy de la france en ce pays la.

Gremoville nest pas Ambasadeur a Vienne et Celon toutte les apparences Jl ne ne sera pas, et ie ne panse pas quon touche cette Corde de longtemps.

on mescrit de paris vne nouvelle a la quelle ie trouve peu dapparance quoy que ie souhaitteroy fort quelle fust Veritable qui est quon appelloit a la Court le Cardl. de Rez pour luy donner seance dans le Conseil. se seroit luy ovrrir la porte au primier ministere et Jl seroit A souhitter quil leust Car Jl le merite mais Jen doutte fort que cela arrive

Je suis a present plus occupe que iamais dans affaires de pomeranie et Commence dy Voir asse Clair Jespere dy profiter notablement et de le regler pour le passe et lavenir mais Jl y faut un peu du temps, et Je ne partiray pas dycy que tout ne soit adiouste. tout ira bien sil plaist a dieu —

With modernised spelling:

Hambourg, 9 février 1667.
Votre lettre du 15 janvier me fait connaître que vous êtes enfin devenu saint tout de bon, et je m'en réjouis avec vous. Je vous promets de travailler durant votre vie au procès de votre canonisation, à condition qu'après ma mort vous travailliez au mien; et, pour répondre à votre prédication, je vous dirai seulement que je sais ce que je dois à Dieu, à vous et à moi, et tâcherai de m'en acquitter.

Vous avez pris l'affaire du médecin d'une manière qui m'aurait surprise en un autre temps, mais sachant que vous êtes dévot, cela ne me surprend plus; car c'est l'effet de la dévotion d'accuser Dieu de toutes les sottises que font les hommes; mais moi, qui ne suis pas si enfoncée dans la dévotion que vous, je prends tout cela d'une autre manière. Le médecin se trompe fort s'il croit d'être rétabli dans mes bonnes grâces: il ne l'est pas, et ne le sera jamais, et ne mérite pas de l'être; mais je sais dissimuler et le laisserai dans son erreur jusqu'au temps qu'il sera à propos de l'en désabuser, pour faire connaître aux gens qu'il y a des fautes qui ne se pardonnent jamais, et celle du médecin est de cette nature, et vous la jugeriez telle, si vous n'étiez dévot ou saint, ou si vous n'aviez intérêt qu'on vous crût tel.

J'ai vu la liste des tableaux du feu Carlo Imperiali, et je tremble de crainte qu'ils ne m'échappent. Je vous remercie du soin que vous avez pris de me les acheter et j'aime mieux de trouver à mon retour (s'il arrive jamais) les tableaux que l'argent; car j'espère de n'en manquer pas, et je suis fort obligée à notre Imperiali, qui me veut donner la préférence au roi de France.

Samedi passé D. Carlo Conti mourut après une maladie de cinq mois, qui n'a jamais été connue du médecin. Il m'a donné peu d'édification durant sa vie et moins en sa mort. Dieu fasse grâce et miséricorde à sa pauvre âme! — D. Arbostino a donné en cette occasion toutes les preuves du plus grand et plus sot animal du monde, et je ne crains la mort en ces lieux que pour avoir le malheur de mourir entre les mains de cette bête. Le père Gaspar, jésuite, l'a assisté avec toute la charité et tout le zèle qui est ordinaire aux pères de sa religion; mais le pauvre homme, ne sachant parler que latin, n'a pu s'en acquitter, comme il aurait fait s'il eût su parler italien. Enfin il lui a donné tous les sacrements de l'Église, dont il aurait été privé par la faute et dapocagine de D. Arbostino, si le père Gaspar n'en eût plus de [zèle] que lui. J'en ai eu la plus grande douleur du monde, car, quelque soin que j'aie pris à le faire bien servir tant pour le corps que pour l'âme, il me semble qu'il a manqué du côté de l'âme des aides que je lui aurais désirés, et j'aurais payé en cette occasion quelque grande somme d'argent pour avoir le père Fozio ici. Nous avons ici le pauvre père Pietro, qui est aussi mourant d'une longue maladie et d'une espèce d'hydropisie. Il meurt comme un vrai ange, et je crois qu'il ira droit en paradis. Il a travaillé quantorze années pour notre religion; [il] a fait beaucoup de fruit, mais ses années et ses indispositions l'ont rendu depuis quelque temps inhabile. Il serait à souhaiter que la place fût remplie d'un homme aussi capable et vertueux qu'il a été, car l'on en a grande nécessité en ce pays.

Les courriers de Suède ne sont plus arrivés depuis les dernières lettres que je vous ai envoyées d'Adami, et les courriers d'ici ne peuvent non plus passer la mer, de sorte qu'il faut avoir patience pour [les] nouvelles de Suède. Cet accident est si rare qu'on n'en a point d'exemple et me donne mille soupçons pour avoir eu depuis ce temps trois courriers de Danemark, de ceux qui ont accoutumé de venir deux fois la semaine, mais sans lettres de Suède; ce qui fortifie mes soupçons. Mais le temps les éclaircira, et il faut avoir patience.

Il n'y a rien de nouveau; tout est paisible en ces lieux. On tient la paix d'Angleterre avec Hollande et France comme assurée. L'Empereur fait, à ce qu'on dit, des grandes levées, le roi de France de grandes revues, l'on ne sait à quelle fin. Pour moi je juge que l'un et l'autre a ses desseins sur la Pologne, et je tiens l'intérêt de la maison d'Autriche en meilleur état que celui de la France en ce pays-là.

Grémonville n'est pas ambassadeur à Vienne et, selon toutes les apparences, il ne [le] sera pas, et je ne pense pas qu'on touche cette corde de longtemps.

On m'écrit de Paris une nouvelle à laquelle je trouve peu d'apparence, quoique je souhaiterais fort qu'elle fût véritable, qui est qu'on appelait à la Cour le cardinal de Retz pour lui donner séance dans le conseil. Ce serait lui ouvrir la porte au premier ministère, et il serait à souhaiter, car il le mérite, mais j'en doute fort que cela arrive.

Je suis à présent plus occupée que jamais dans [les] affaires de Poméranie et commence d'y voir assez clair. J'espère d'y profiter notablement et de les régler pour le passé et l'avenir, mais il faut un peu de temps, et je ne partirai pas d'ici que tout ne soit ajusté. Tout ira bien s'il plaît à Dieu.

English translation (my own):

Forty-seventh
letter of February 9, 1667.
Your letter of January 15 lets me know that you have finally become a saint, and I rejoice with you. I promise you to work during your life on the process of your canonisation, on condition that after my death you work on mine; and, to answer your preaching, I will tell you only that I know what I owe to God, to you and to me, and will try to discharge it.

You took the doctor's business in a way that would have surprised me at another time, but knowing that you are devout, that no longer surprises me, for it is the effect of devotion to accuse God of all the foolishness that men do; but I, who am not so deep in devotion as you, take all this in another way. The doctor is very mistaken if he thinks he has been restored in my good graces: he is not, and never will be, and does not deserve to be; but I know how to dissimulate and will leave him in his error until the time is appropriate to disillusion him, to let people know that there are faults which can never be forgiven, and that of the doctor is of this nature, and you would judge it as such, if you were not devotee or saint, or if it were not in your interest to be believed to be such.

I have seen the list of paintings by the late Carlo Imperiali, and I tremble for fear they will escape me. I thank you for the care you took in buying them for me, and I would rather find the paintings on my return (if that ever happens) than the money, for I hope not to miss any; and I am greatly obliged to our Imperiali, who wishes to give me preference to the King of France.

Last Saturday Don Carlo Conti died after an illness of five months, which was never known to the doctor. He gave me little edification during his life and less during his death. God have grace and mercy on his poor soul! — Don Arbostino has given on this occasion all the proofs of the greatest and stupidest animal in the world, and I fear death in these places only to have the misfortune of dying at the hands of this beast. Father Gaspar, a Jesuit, assisted him with all the charity and all the zeal which is common to the fathers of his religion; but the poor man, knowing only how to speak Latin, could not do so, as he would have done if he had known how to speak Italian. Finally he gave him all the sacraments of the Church, of which he would have been deprived by the fault and dappocaggine of Don Arbostino, if Father Gaspar had no more zeal than him. I had the greatest pain of it in the world, because, whatever care I took to make it serve well both for the body and for the soul, it seems to me that it was lacking on the side of the soul, the help that I would have wished for him, and I would have paid on this occasion some large sum of money to have Father Fozio here. Here we have poor Father Pietro, who is also dying of a long illness and a kind of dropsy. He is dying like a real angel, and I believe he will go straight to Heaven. He worked for fifteen years for our religion; he has produced much fruit, but his years and his indispositions have made him for some time incompetent. It would be hoped that the place was filled with a man as capable and virtuous as he was, for there is a great need for him in this country.

Couriers from Sweden have not arrived since the last letters I sent you from Adami, and couriers from here cannot cross the sea either, so you have to be patient with news from Sweden. This accident is so rare that there are no examples of it, and gives me a thousand suspicions that I have since had three couriers from Denmark, from those who are accustomed to coming twice a week, but without letters from Sweden, which strengthens my suspicions. But time will clear them up, and one must be patient.

There's nothing new; everything is peaceful in these places. One holds the peace of England with Holland and France as assured. The Emperor is said to have great levies, the King of France great reviews, no one knows for what end. For my part, I judge that both have their designs for Poland, and I hold the interests of the House of Austria in a better state than that of France in that country.

Grémonville is not an ambassador in Vienna, and by all appearances he won't be, and I don't think one touches that cord for long.

A piece of news is being written to me from Paris, which I find little appearance, although I would very much wish it to be true, which is that Cardinal de Retz was called to the Court to give him a sitting in the council. That would be opening the door to the first ministry for him, and it would be hoped so, because he deserves it, but I very much doubt that will happen.

I am now busier than ever in Pomeranian affairs and am starting to see it fairly clearly. I hope to take advantage of it and sort it out for the past and the future, but it takes a little while, and I won't be leaving until everything is adjusted. Everything will be fine, if it pleases God.


Above: Kristina.


Above: Cardinal Decio Azzolino.

Note: dappocaggine = nonchalance.

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