Monday, October 18, 2021

Kristina's memorandum for Johan Cederkrantz, with a postscript in her/his/their own hand, dated September 24, 1678

Sources:

Bref och handlingar hörande till Drottning Christinas historia efter originalerna utgifne, page 29, E. S. Bring, 1832


Mémoires concernant Christine, volume 2, pages 173 to 174, Johan Arckenholtz, 1751


The memorandum:

Memoire pour CederCrantz
fait a Rome le 24 Sept. 1678.

1. Il faut Supposer pour fondement indubitable que La Reine ne pretendera iamais rien au prejudice de La Suede, et qu'Elle ne uoudra iamais rien de ce qui Se peut conseruer pour cette Couronne.

2. Il faut donc tacher de Sauuer pour Sa Majesté uniquement ce que La Suede perdera en Allemagne et ailleurs du debry de La Suede, et rien de plus.

3. Il faut aussi Scauoir que Sa Maj:té n'ayant nulle intention de prejudicier aux interest de La Suede, ny de Luy donner jalousie, La Suede auroit tort de S'opposer aux justes Satisfactions de La Reine, et ce Seroit estre jalouse de Sa propre gloire et d'elle mesme, que de prendre jalousie ou de S'offencer de ce que Sa Maj:té cherche dans un temps Si calamiteux Ses auantages de la maniere qu'il Luy Sera permis Sans prejudice de la Couronne; et c'est la dessus qu'il faut que uous reigliez uos penses paroles et actions en touts lieux et en touts temps.

4. Si la Suede n'a autre moyen de recouurir ses estats que celluy de l'argent que la france donnera pour elle, ils seront perdus pour iamais et c'est se flatter en uain que de l'esperer, et L'on uous asseure de nouueau que la Suede les perdera Sans resource, et que le temps uiendra dans lequel La france faira ses affaires, Sans se souuenir non plus de La Suede que Si Elle n'estoit plus au Monde; et L'on uerra enfin le reste de la Pommeranie perdu, La Suede chassé de L'Allemagne Si bien qu'il n'y paroistera plus qu'elle y aye iamais esté, et quand cela sera fait, toutte la puissance de La France, ny cella de toutte L'Europe ne la restabliront plus; deux ou trois annees de geurre auec les Danois metteront La Suede bien bas, et La France mesme uient de receuoir un coup en flandre qui la mettera aussi en un tres mechant estat: L'on se flatte en uain et uous uerres Ses predictions bientost auerrées; on souhaitte touttefois de Se tromper.

5. L'intention de La Reine est donc de faire Ses affaires auec La Suede, et fair trauailler a leur communs interests en mesme temps, mais Si La Suede ueut L'amuser et Se mocquer d'Elle on n'y reussira pas, car La Reine ueut de Satisfactions reelles et Solides, Si on les Luy donne en Suede Elle sera contente, et n'en demandera pas mieux, mais Si on Luy refuse ses justes Satisfactions, Elle tachera de Se Satisfaire Elle mesme par quelque endroit, estant resolue de faire ses affaires, S'y uoyent forcée par des procedes malhonestes, et desobligeants dont on a usé jusques icy a Son endroit, aussi bien ne peut Elle plus rien perdre, et Elle est en estat de pouuoir bien gaigner.

6. Il faut Scauoir aussi qu'on n'est pas Si Sotte que de conter Sur l'argent de France, Sa Maj:té Scait qu'Elle n'en a plus gerre, mais quand elle en auroit, on Scait tres bien que La France n'en a pas pour La Reine.

7. Ces Sont là les Sentiments justes et raisonables de La Reine dont Elle ne fait point de Secret, on uous permet de les publier par tout, car estant dignes de Sa Maj:té Elle ne craingt pas de les faire paroistre aux yeux de toutte La terre.

Il faut pourtan user de prudence et de circonspection et prendre garde a qui lon parle, et ne dire a chaque un que ce qui est agreable et utile a ses desseins et interest
XST ALEX

par lordinaire prochain je reponderay a vostre lettre du 26 passe nayant pas a present le loisir.
André Galdenblad.

With modernised spelling:

Mémoire pour Cederkrantz
fait à Rome le 24 septembre 1678.

1. Il faut supposer pour fondement indubitable que la Reine ne prétendera jamais rien au préjudice de la Suède, et qu'elle ne voudra jamais rien de ce qui se peut conserver pour cette Couronne.

2. Il faut donc tâcher de sauver pour Sa Majesté uniquement ce que la Suède perdra en Allemagne et ailleurs du débris de la Suède, et rien de plus.

3. Il faut aussi savoir que Sa Majesté n'ayant nulle intention de préjudicier aux intérêt de la Suède, ni de lui donner jalousie, la Suède aurait tort de s'opposer aux justes satisfactions de la Reine, et ce serait être jalouse de sa propre gloire et d'elle-même, que de prendre jalousie ou de s'offenser de ce que Sa Majesté cherche dans un temps si calamiteux ses avantages de la manière qu'il lui sera permis sans préjudice de la Couronne; et c'est là-dessus qu'il faut que vous régliez vos pensées, paroles et actions en tous lieux et en tous temps.

4. Si la Suède n'a autre moyen de recouvrir ses états que celui de l'argent que la France donnera pour elle, ils seront perdus pour jamais, et c'est se flatter en vain que de l'espérer; et l'on vous assure de nouveau que la Suède les perdra sans ressource, et que le temps viendra dans lequel la France fera ses affaires, sans se souvenir non plus de la Suède que si elle n'était plus au monde; et l'on verra enfin le reste de la Poméranie perdu; la Suède chassée de l'Allemagne, si bien qu'il n'y paraîtra plus qu'elle y ait jamais été, et quand cela sera fait, toute la puissance de la France, ni cela de toute l'Europe, ne la rétabliront plus; deux ou trois années de guerre avec les Danois mettront la Suède bien bas, et la France même vient de recevoir un coup en Flandre qui la mettra aussi en un très méchant état. L'on se flatte en vain, et vous verres ses prédictions bientôt accomplies. On souhaite toutefois de se tromper.

5. L'intention de la Reine est donc de faire ses affaires avec la Suède, et faire travailler à leurs communs intérêts en même temps; mais si la Suède veut l'amuser et se moquer d'elle, on n'y réussira pas, car la Reine veut de satisfactions réelles et solides. Si on les lui donne en Suède, elle sera contente et n'en demandera pas mieux. Mais si on lui refuse ses justes satisfactions, elle tâchera de se satisfaire elle-même par quelque endroit, étant résolue de faire ses affaires, s'y voyant forcée par des procédés malhonnêtes et désobligeants dont on a usé jusqu'ici à son endroit, aussi bien ne peut elle plus rien perdre, et elle est en état de pouvoir bien gagner.

6. Il faut savoir aussi qu'on n'est pas si sotte que de compter sur l'argent de France, Sa Majesté sait qu'elle n'en a plus guères, mais quand elle en aurait, on sait très bien que la France n'en a pas pour la Reine.

7. Ces sont-là les sentiments justes et raisonnables de la Reine dont elle ne fait point de secrèt. On vous permet de les publier partout, car étant dignes de Sa Majesté, elle ne craint pas de les faire paraître aux yeux de toute la terre.

Il faut pourtant user de prudence et de circonspection et prendre garde à qui l'on parle, et ne dire à chaque un que ce qui est agréable et utile à ses desseins et intérêts.
Xst. Alex.

Par l'ordinaire prochain je répondrai à votre lettre du 26 [du] passé, n'ayant pas à présent le loisir.
André Galdenblad.

Arckenholtz's transcript of the memorandum:

Mémoire pour Cedercrantz fait à Rome le 22. Sept. 1678.

1. Il faut supposer pour fondement indubitable que la Reine ne prétendra jamais rien en préjudice de la Suède, & qu'elle ne voudra jamais rien de ce qui peut se conserver pour cette Couronne.

2. Il faut donc tâcher de sauver pour S. M. uniquement ce que la Suède perdra en Allemagne & ailleurs du débris de la Suède, & rien de plus.

3. Il faut aussi savoîr que Sa Majesté n'aïant nulle intention de préjudicier aux intérêts de la Suède, ni de lui donner jalousie, la Suède auroit tort de s'opposer aux justes satisfactions de la Reine, & ce seroit être jalouse de sa propre gloire & d'elle-même, que de prendre jalousie ou de s'offenser de ce que S. M. cherche, dans un tems si facheux ses avantages de la manière qu'il lui sera permis sans préjudice de la Couronne, & c'est là-dessus qu'il faut que vous régliez vos pensées, paroles & actions en tous lieux & en tous tems.

4. Si la Suède n'a autre moïen de recouvrer ses états que celui de l'argent que la France donnera pour elle, ils seront perdus pour jamais, & c'est se flatter en vain que de l'espérer, et l'on vous assure de nouveau que la Suède les perdra sans ressource, & que le tems viendra dans lequel la France fera ses affaires, sans se souvenir non plus de la Suède, que si elle n'étoit plus au monde & l'on verra enfin le reste de la Poméranie perdu; la Suède chassée de l'Allemagne, si bien qu'il n'y paroitra plus qu'elle y ait jamais été, & quand cela sera fait, toute la Puissance de la France, ni celle de toute l'Europe ne la rétabliront plus. Deux ou trois années de geurre avec le Danois mettront la Suède bien bas, & la France même vient de recevoir un coup en Flandres qui la mettra aussi en un très-méchant état. L'on se flatte en vain, & vous verrez ses prédictions bientôt accomplies. On souhaite toutefois de se tromper.

5. L'intention de la Reine est donc d'agir avec la Suède & de faire travailler à leurs communs intérêts en même tems. Mais si la Suède veut l'amuser & se moquer d'Elle, on n'y réussira pas, car la Reine veut des satisfactions réelles & solides. Si on les lui donne en Suède, elle sera contente & ne demandera pas mieux. Mais si on lui refuse ses justes satisfactions, elle tâchera de se satisfaire elle-même par quelque endroit, étant résoluë de pousser ses affaires, forcée comme elle y est par des procédés malhonnêtes & désobligeans, dont on a usé jusqu'ici à son égard: aussi bien ne peut elle plus rien perdre & est-elle en état de bien gagner.

6. Il faut savoir aussi qu'on n'est pas si sot que de compter sur l'argent de France, Sa Majesté sait qu'elle n'en a plus guères: mais quand elle en auroit, on sait très-bien que la France n'en a pas pour la Reine.

7. Ce sont-là les sentiments justes & raisonnables de la Reine dont elle ne fait point de secrèt. On vous permèt de les publier partout, car étant dignes de Sa Majesté, elle ne craint pas de les faire paroitre aux yeux de toute la terre. Il faut pourtant user de prudence & de circonspection & prendre garde à qui l'on parle, & ne dire à chacun que ce qui est agréable & utile à ses desseins & intérêts.
CHRISTINE ALEXANDRA
André Galdenblad.

English translation (my own):

Memorandum for Cederkrantz
made in Rome, September 24, 1678.

1. It must be assumed as an unmistakable foundation that the Queen will never claim anything to the prejudice of Sweden, and that she will never want anything that can be preserved for this Crown.

2. One must therefore try to save for Her Majesty only what Sweden will lose in Germany and elsewhere of the debris of Sweden, and nothing more.

3. It should also be known that Her Majesty having no intention of prejudicing the interests of Sweden, nor of making her jealous, Sweden would be wrong to oppose the just satisfactions of the Queen, and that would be jealous of her own glory and of herself, than to take jealousy or to be offended that Her Majesty seeks in such a calamitous time her advantages in the manner which will be permitted her without prejudice to the Crown; and it is on this that you must regulate your thoughts, words and actions in all places and at all times.

4. If Sweden has no other means of recovering her estates than that of the money which France will give for her, they will be lost forever, and it is to flatter herself in vain to hope so; and one assures you again that Sweden will lose them without resource, and that the time will come when France will do her business without remembering Sweden either, unless she were no longer in the world; and one will finally see the rest of Pomerania lost and Sweden expelled from Germany, so that it will no longer appear that she ever was there; and when that is done, all the power of France, nor that of all Europe, will restore it. Two or three years of war with the Danes will put Sweden very low, and France itself has just received a blow in Flanders which will also put her in a very bad state. One flatters oneself in vain, and you see one's predictions soon fulfilled. However, one wishes to be wrong.

5. The Queen's intention, therefore, is to do her affairs with Sweden, and to work for their common interests at the same time; but if Sweden wants to amuse her and make fun of her, they will not succeed, for the Queen wants real and solid satisfaction. If one gives them to her in Sweden, she will be happy and ask for nothing better. But if she is denied her just satisfactions, she will try to satisfy herself in some place, being resolved to do her business, finding herself forced to do so by dishonest and derogatory procedures which have hitherto been used against her, she can no longer lose anything, and she is in a position to be able to gain well.

6. It should also be known that one is not so stupid as to count on the money of France, Her Majesty knows that she hardly has any more, but when she does have some, one knows very well that France has none for the Queen.

7. These are the Queen's just and reasonable sentiments, of which she makes no secret. You are allowed to publish them everywhere, because being worthy of Her Majesty, she does not hesitate to make them appear before the eyes of all the earth.

However, it is necessary to be cautious and circumspect and beware of to whom one speaks, and to tell each one only what is agreeable and useful to his designs and interests.
Xst. Alex.
Andreas Galdenblad.

By the next ordinary I will reply to your letter of the 26th of last month, not having the leisure at present.


Above: Kristina.

No comments:

Post a Comment